Rapport sur la 38ème session du Conseil des droits de l’Homme

by Geneva Human Rights Council reports, Regular session

Bref résumé:

  • La 38ème session ordinaire du Conseil des droits de l’Homme (CDH38) s’est déroulée du lundi 18 juin au vendredi 6 juillet 2018.
  • Le 18 juin, Monsieur Zeid Ra’ad Al Hussein a donné son discours introductif sur l’état global des droits de l’Homme, en tant que Haut-Commissaire de l’ONU. Son successeur sera désigné par le Secrétaire général de l’ONU Antonia Guterres au cours de l’été.
  • Un certain nombre de dignitaires ont fait des déclarations pendant la session, notamment Monsieur Borut Pahor, Président de la Slovénie, Madame Karin Kneissl, Ministre fédéral pour l’Europe l’Intégration et les Affaires étrangères (Autriche), Monsieur Boris Johnson, Secrétaire d’Etat pour les Affaires étrangères et du Commonwealth (Grande-Bretagne), Monsieur Mohammad Farid Hamidi, Procureur général (Afghanistan) et Monsieur Hassan Al Tawadi, Secrétaire général du Comité suprême pour le comité Delivery and Legacy (Qatar).
  • Les Etats-Unis d’Amérique ont annoncé leur retrait du Conseil le 19 juin, devenant ainsi le premier Etat membre du Conseil à volontairement retirer son adhésion.
  • Quatre débats interactifs ont été tenu lors de la session.
  • Plus de 95 rapports sous les différents points de l’agenda du Conseil ont été considérés.
  • Plus de 220 évènements parallèles ont été tenus par des Etats et/ou des ONG durant la session.
  • Les résultats des comptes rendu du Groupe de travail EPU des 14 pays suivant ont été adoptés : France, Tonga, Roumanie, Mali, Botswana, Bahamas, Burundi, Luxembourg, Barbade, Monténégro, Émirats Arabes Unis, Israël, Liechtenstein et Serbie.
  • Cinq nouveaux titulaires de mandats des procédures spéciales ont été nommés pour les mandats suivant : Rapporteur spécial sur les droits de l’homme et de l’environnement ; Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran ; deux membres (un pour le Groupe africain et un pour le groupe des États d’Europe orientale) pour le Groupe de travail sur l’utilisation de mercenaires comme moyen de violer les droits de l’homme et d’empêcher l’exercice du droit des peuples.
  • 20 textes (tous des résolutions) ont été examinés et adoptés par le Conseil. Cela représente une diminution significative (baisse de 46%) par rapport à juin (HRC35), où 37 textes ont été adoptés (un record pour une session de juin). Cela semble être le résultat (un peu tardif) de la campagne d’efficacité lancée par le neuvième président du Conseil des droits de l’homme, Monsieur Joachim Rücker en 2015, et du processus de «renforcement» en cours mené par l’actuel Bureau du Conseil.
  • 18 amendements écrits et/ou oral ont été soumis par des États au cours de l’examen des résolution – aucun ont été adoptées par vote ; 12 ont été rejetées par vote ; et six ont été retirées.
  • 13 des textes adoptés par le Conseil (65%) ont des incidences sur le budget-programme (PBI) et 10 nécessitent de nouveaux crédits non inclus dans le précédent budget-programme. Le coût total des nouvelles activités mandatées a représenté un total de 1 907 500 dollars (au moment de la publication de ce rapport).

Exposé du Haut-Commissaire pour les droits de l’homme

Lors de son dernier exposé ordinaire devant le Conseil, Monsieur Zeid Ra’ad Al Hussein, Haut-Commissaire aux droits de l’homme, a partagé une réflexion sur les attaques contre les droits de l’homme perpétrés par l’extrémisme violent, les leaders autoritaires et même certains officiels de l’ONU. Il a fait l’hypothèse que les plus grandes menaces que le monde ait connues sont venues du nationalisme chauvin et que les Nations Unies ont été mise en place afin de prévenir le retour de telles forces. Face à des problèmes croissants, il a reproché à nombreux États membres de l’ONU de n’agir que dans leur propre intérêt, en direct opposition au bien commun. Il a appelé les Nations Unies, ainsi que son Office, à continuer de soutenir sans peur le droit international relatifs aux droits humains et les institutions multilatérales d’une voix forte et unifiée.

Se tournant une fois de plus sur les problèmes relatifs à la coopération des États membres avec les mécanismes des droits humains de l’ONU, le Haut-Commissaire a réitéré l’irréfutable mandat de son Office à diriger le suivi des droits de l’homme où il existe de sérieuses raisons de penser que des violations ont lieu.

Le Haut-Commissaire a rapporté que certains États ont régulièrement refusé l’accès à son Office ou à des titulaires de mandats de procédures spéciales tels que, entre autres, la Syrie, la Birmanie et le Venezuela. Malgré les requêtes, presque 40 États n’ont reçu aucune visite d’une procédure spéciale au cours de ces cinq dernières années. Parmi ces 40 États, 15 ont plus de 5 requêtes de visite en attente tels que, entre autres, la Biélorussie, la République démocratique du Congo et le Yémen.

Le Haut-Commissaire a regretté les pratiques de certains États de refuser formellement la coopération avec l’Expert indépendant sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre du Conseil. Il a mise en exergue les discriminations importantes, souvent officielles, auxquelles sont confrontées la communauté LGBTI et a réaffirmé que la protection de tous les êtres humains, y compris les membres de la communauté LGBTI, est centrale dans les principes et le travail du Conseil. A cet égard, il a aussi mis en évidence l’hostilité croissante des politiques sur la migration, qui entravent l’accès des migrants à la société civile.

Le Haut-Commissaire a aussi rapporté des développements positifs dans l’accès et la coopération relativement aux procédures spéciales, qui se targue maintenant d’une augmentation du taux de réponse positives de 68%. Il a salué un certain nombre d’États tels que, entre autres, le Chili, le Kazakhstan et le Sri Lanka pour avoir accueilli au moins cinq titulaires de spéciales procédures thématiques au cours des cinq dernières années. En ce qui concerne la collaboration avec les organes conventionnels, le Haut-Commissaire s’est en outre félicité de la présentation aux comités de rapports de longue date par un certain nombre d’États, notamment la République centrafricaine, le Mali et les Tonga. Enfin, il a félicité un certain nombre d’États pour leur engagement à avoir accès et coopérer avec les titulaires de mandat du HCDH et des procédures spéciales, notamment l’Éthiopie, l’Ouzbékistan et le Zimbabwe.

En conclusion, le Haut-Commissaire a réitéré l’importance de l’accès pour le respect et la mise en œuvre des engagements pris par les États eux-mêmes en matière de droits de l’homme. Il a également souligné les synergies entre la mise en œuvre et le programme de prévention, notant que la mise en œuvre de l’agenda des droits de l’homme renforce les sociétés inclusives, le développement et la paix. Rappelant les 70 dernières années de paix durable dans et entre de nombreuses sociétés, il a salué les nombreux exemples où les sociétés ont défendu les droits de l’homme. Cependant, il a exhorté les États et les dirigeants à ne pas porter atteinte aux droits de la personne au nom d’un patriotisme croissant ou d’un nationalisme qui consiste véritablement à «créer des communautés tolérantes qui peuvent vivre en paix».

Trouvez la déclaration complète ici.

Dignitaires de haut niveau

Dans sa déclaration au Conseil, Monsieur Borut Pahor, Président de la Slovénie, a réaffirmé l’attachement indéfectible de son pays au multilatéralisme et a souligné l’importance des structures multilatérales existantes pour le maintien de la paix et la protection des droits de l’homme. Il a reconnu que le Conseil était plus faible sans les États-Unis, mais a noté que les efforts des États-Unis pour promouvoir les droits de l’homme seraient également plus faibles. Enfin, il a déclaré que les réformes du Conseil doivent être le fruit d’un dialogue constructif. (lien vers la déclaration)

Dans son allocution au Conseil, Monsieur Boris Johnson, secrétaire d’État aux Affaires étrangères et du Commonwealth du Royaume-Uni, a commencé par reconnaître la valeur du Conseil. Il a toutefois déploré l’existence d’un «point spécifique de l’ordre du jour axé uniquement sur Israël» et a annoncé que le Royaume-Uni «voterait contre toutes les résolutions présentées au titre du point 7» à partir de l’année prochaine. Monsieur Johnson s’est ensuite penché sur l’égalité des sexes en classe, insistant sur la nécessité d’assurer à chaque fille du monde 12 années d’éducation de qualité, non seulement pour les avantages économiques et les dividendes du développement, mais surtout au simple nom de la justice et de l’équité ». (lien vers la déclaration)

Monsieur Hassan Al Thawadi, Secrétaire général du Comité suprême Delivery and Legacy du Qatar, a salué le travail du Haut-Commissaire et sa compréhension d’une approche multidimensionnelle des droits de l’homme. Monsieur Al Thawadi a noté la manière dont la Coupe du monde de 2022 permettait au Qatar de faire des progrès significatifs en matière de droits de l’homme, et comment le sport peut rassembler le monde et combler des fossés apparemment insurmontables. (lien vers la déclaration)

Madame Karin Kneissl, Ministre fédérale pour l’Europe, l’intégration et les affaires étrangères de l’Autriche, a rappelé que 200 millions de femmes et de filles dans le monde étaient victimes de mutilations génitales féminines et a réaffirmé que l’Autriche était résolue à combattre cette pratique. Elle a également noté que le Conseil n’est pas parfait et qu’il était nécessaire d’examiner les lacunes de l’organisme. Cependant, Mme Kneissl a souligné qu ‘«il n’y a pas d’autre alternative raisonnable au dialogue et à la coopération internationale lorsqu’il s’agit de surmonter des problèmes communs». À ce titre, elle sollicite le soutien de la candidature de l’Autriche au Conseil des droits de l’homme et souligne son engagement à protéger les droits de l’homme pour tous. (lien vers la déclaration)

Tables rondes

Au total, quatre tables rondes ont été tenues pendant la 38ème session. Les panels étaient sur les sujets suivants (cliquez pour les résumés des réunions du HCDH):

Fonds d’affectation spéciale pour soutenir la participation des PMA et des PEID

Le Fonds d’affectation spéciale pour la participation des PMA et des PEIDaux travaux du Conseil (créé en 2012) a financé la participation de huit fonctionnaires (sept femmes et un homme) à la CDH38 en provenance de la Jamaïque, des Îles Marshall, de Maurice, du Samoa, des Seychelles, du Soudan, de Tonga et de Zambie. Pour chacun d’entre eux, il s’agissait de leur première participation à une session du Conseil.

Au cours de la session, le Fonds d’affectation spéciale, en coopération avec la Mission permanente du Danemark, a célébré le centième représentant des bénéficiaires. L’occasion a été marquée par un événement parallèle et l’ouverture d’un «photomaton» pour souligner l’importance de la participation et de la représentation universelles au Conseil des droits de l’homme.

Commissions d’enquête, missions d’enquête et investigations

Commission d’enquête au Burundi

Au cours d’un dialogue interactifà HRC38, la Commission d’enquête sur le Burundi a présenté une mise à jour orale. Le président de la Commission, M. Doudou Diène, a noté que la situation des droits de l’homme au Burundi demeurait “très préoccupante”. Mme Françoise Hampson, membre de la Commission, a fait remarquer que depuis le début de 2018, des violations des droits de l’homme, notamment des exécutions extrajudiciaires, des disparitions forcées, des actes de torture et des traitements inhumains ou dégradants, ont persisté contre les opposants à la proposition de modification de la Constitution. Elle a ajouté que les autorités burundaises n’ont pas mené d’enquête à cet égard.

Madame Lucy Asuagbor, membre de la Commission, a noté que le président burundais n’avait fait qu’engager des menaces et des actes d’intimidation, encourageant ainsi l’hostilité et la violence.

M. Diène a prévenu le Conseil que la situation pourrait bien se détériorer à mesure que la position se durcirait. Par exemple, il a noté que les figures de l’opposition ont commencé à appeler à une «révolution».

Le Burundi, s’exprimant en tant qu’Etat concerné, a rejeté la mise à jour orale. Il a affirmé que la commission d’enquête ne possède pas l’expertise nécessaire pour analyser et comprendre correctement la situation dans le pays.

En réponse, M. Diène a fait valoir que le seul moyen de vérifier véritablement et objectivement les faits et d’assurer la responsabilité des violations graves des droits de l’homme consisterait pour le Burundi à accorder un plein accès au COI et à le laisser faire son travail.

Commission d’enquête internationale indépendante sur la République arabe syrienne

Le 26 juin, les Etats ont tenu un dialogue interactif avec la Commission d’enquête sur la République arabe syrienne. Le Président, Monsieur Paulo Sérgio Pinheiro, a noté que la situation dans la Ghouta orientale était prévisible et évitable. Il a déclaré que le conflit global avait certaines des violations des droits de l’homme les plus brutales perpétrées dans l’histoire humaine moderne. Des civils innocents se sont retrouvés avec six millions de Syriens maintenant déplacés à l’intérieur du pays (jusqu’à présent, 920 000 ont été déplacés en 2018). Monsieur Pinheiro a déclaré que la seule manière de mettre fin au conflit était de donner effet à la résolution 2254 du Conseil de sécurité.

Madame Karen Koning, membre de la Commission, a souligné que les enfants étaient le groupe le plus vulnérable affecté par le conflit. Ils ont été terriblement affectés, entre autres, par la malnutrition, le manque d’accès à l’éducation et leur recrutement dans des groupes armés dans le nord du pays. Monsieur Hanny Megally, également membre de la Commission, a mis en évidence un nouveau rapport sur les violences sexuelles par la Commission.

La Syrie, parlant en tant que pays concerné, a déclaré que le rapport de la Commission était criblé de fausses déclarations, d’erreurs et de contradictions. Il a souligné que la Commission avait ignoré les témoignages et qu’elle avait méconnu le droit de l’État de se défendre contre les groupes armés non étatiques.

Examen périodique universel

Adoption des rapports de résultats du groupe de travail de l’EPU

Le Conseil a adopté les rapports finals de l’EPU de la France, des Tonga, de la Roumanie, du Mali, du Botswana, des Bahamas, du Burundi, du Luxembourg, de la Barbade, du Monténégro, des Émirats arabes unis, d’Israël, du Liechtenstein et de la Serbie. Au total, 2 632 recommandations ont été faites à ces 14 États, parmi lesquelles 1703 ont été acceptées en totalité ou en partie, 66 ont été acceptées partiellement et 863 ont été notées ou rejetées.

Israël n’était pas présent lors de l’examen des résultats de son Examen périodique universel et de l’adoption du rapport. Ceci a été conçu pour démontrer la solidarité avec les Etats-Unis, qui se sont retirés du Conseil plus tôt dans la session en raison de ce qu’ils considèrent comme une concentration injustifiée du corps sur Israël. Néanmoins, l’absence d’un État dans l’adoption de son résultat d’EPU est moins grave que le refus de participer à l’examen lui-même (c’est-à-dire dans le groupe de travail sur l’EPU). Pour le moment, l’EPU maintient un record de participation de 100% dans ces revues.

État à l’étude Nombre de recommandations acceptées par/bénéficiant du soutien de l’État Constaté par/ Rejeté par/ Ne bénéficiant pas du plein soutien de l’État Recommandations partiellement acceptées par l’État Nombre total de recommandations
France 238 25 34 297
Tonga 0 110 0 110
Roumanie 163 37 3 203
Mali 187 7 0 194
Botswana 93 114 0 207
Bahamas 78 57 6 141
Burundi 124 118 0 242
Luxembourg 135 14 0 149
Barbados 65 67 0 132
Montenegro 159 110 0 169
U.A.E. 132 100 0 232
Israël 70 147 23 240
Liechtenstein 84 42 0 126
Serbie 175 15 0 190

Débat général sous le point 6

Au cours du débat général au titre du point 6 (EPU), tenu le 29 juin, le Togo a fait une déclaration au nom du groupe des pays africains sur l’importance d’une mise en œuvre et d’un suivi appropriés. Dans ce document, les États africains ont appelé leurs pairs du groupe de travail de l’EPU à présenter un «nombre raisonnable de recommandations qualitatives et réalistes qui aideraient ainsi à assurer leur mise en œuvre par l’État examiné». Le Togo a également demandé que l’on accorde une attention accrue à la mise en œuvre et au suivi «par le biais de structures de coordination nationales et d’approches inclusives». Le Groupe africain a également attiré l’attention sur les problèmes de mise en œuvre auxquels sont confrontés les pays en développement, en particulier les PMA et les PEID, et a donc rappelé l’importance cruciale de l’assistance technique et du renforcement des capacités.

Le Paraguay, au nom des 28 membres du «groupe d’amis sur la mise en œuvre nationale, les rapports et le suivi», a également prononcé une déclaration axée sur la mobilisation de l’assistance technique et le renforcement des capacités pour soutenir la mise en œuvre nationale. Le Paraguay a appelé l’attention sur le rapport HRC/38/27 du Secrétaire général sur le fonctionnement du fonds fiduciaire d’assistance technique de l’Examen périodique universel. Le Paraguay a noté que le rapport du Secrétaire général exprime son soutien au développement, dans de nombreux pays, de «mécanismes nationaux de mise en œuvre, de notification et de suivi» (NMIRF). Le Paraguay a déclaré que les NMIRF ont un potentiel énorme pour générer un nouvel élan derrière la mise en œuvre – tant pour les droits de l’homme que pour les ODD. Le Paraguay, au nom du groupe d’amis, a encouragé les États qui souhaitent améliorer la mise en œuvre, en particulier par la création ou le renforcement de NMIRF, à demander une coopération technique par l’intermédiaire du fonds fiduciaire de l’EPU.

La Fédération de Russie, s’exprimant au nom d’un groupe interrégional de 22 États, a pris note de la nouvelle pratique du HCDH consistant à envoyer des lettres aux États après leur EPU, soulignant les recommandations qui, selon le Bureau, requièrent une attention particulière. Selon la déclaration russe: «une telle pratique consistant à établir une hiérarchie entre les recommandations est inacceptable». Le groupe d’États a souligné que le rôle du HCDH dans l’EPU est clairement défini aux paragraphes 15 à 19 de la résolution 5/1 du Conseil.

Dans sa déclaration au nom de l’UE, la Bulgarie a noté que la participation des ONG et des institutions nationales des droits de l’homme est essentielle pour garantir que le processus de l’EPU ait un impact réel et tangible sur le terrain. Ils ont également noté l’importance des parlements nationaux pour la mise en œuvre des recommandations de l’EPU. Enfin, l’Union européenne a souligné l’importance de la défense des défenseurs des droits de l’homme et a fait part de ses préoccupations concernant les représailles à l’encontre des personnes impliquées dans les mécanismes onusiens, y compris l’EPU.

Procédures spéciales

18 titulaires de mandat (14 thématiques, quatre de pays) ont fait des mises à jour orales ou ont présenté des rapports annuels pendant le CDH38 (tous disponibles ici). Au cours de 13 dialogues interactifs (huit «groupés» et cinq individuels), 122 États ont présenté des déclarations (individuelles ou conjointes), dont 21% provenaient du Groupe africain, 23% d’APG, 16% d’EEG, 16% de GRULAC, 24% provenant du WEOG et 1% des «autres pays» (à savoir l’État de Palestine et le Saint-Siège).

Nomination de nouveaux titulaires de mandat

Cinq nouveaux titulaires de mandat ont été nommés au cours de la session pour pourvoir des postes sur des mandats existants. Le dernier jour de la session, les titulaires de mandat suivants ont été nommés :

  1. Monsieur David R. Boyd (Canada) a été nommé en tant que Rapporteur spécial sur les droits de l’homme et de l’environnement.
  2. Monsieur Javaid Rehman (Pakistan) a été nommé en tant que Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran.
  3. Monsieur Githu Muigai (Kenya) a été nommé en tant que membre du Groupe africain au Groupe de Travail sur la question des droits de l’homme et des entreprises transnationales et autres entreprises.
  4. Madame Elzbieta Karska (Poland) a été nommée en tant que membre des États de l’Europe de l’Est au Groupe de Travail sur la question des droits de l’homme et des entreprises transnationales et autres entreprises.
  5. Madame Sorcha Macleod (Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord) a été nommée en tant que membre du Groupe des États d’Europe occidentale et autres (WEOG) au Groupe de travail sur l’utilisation de mercenaires comme moyen de violer les droits de l’homme et d’empêcher l’exercice du droit des peuples.

Pour le choix des nominations, le Groupe consultatif, composé de représentants de l’Éthiopie, de Singapour, de l’Azerbaïdjan, de l’Équateur et d’Israël, a examiné environ 56 candidatures individuelles pour cinq postes vacants. Le groupe consultatif a adressé ses recommandations au président du Conseil le 18 mai 2018 pour cinq postes vacants. Ayant “tenu de larges consultations, notamment par l’intermédiaire des coordonnateurs régionaux et sur la base des recommandations du Groupe consultatif”, le Président a suivi les recommandations du Groupe consultatif pour les cinq mandats. Ses propositions ont été envoyées au Conseil par lettre le 4 juin 2018.

Il existe aujourd’hui 56 mandats de procédures spéciales (44 thématiques et 12 pays spécifiques) et 80 titulaires de mandats (56% d’hommes et 44% de femmes). 

Débat général sous le point 5

Au cours du débat général sur le point 5, tenu du 27 au 28 juin, le Brésil a fait une déclaration au nom d’un groupe de pays soulignant l’importance du dialogue et de l’engagement dans les négociations de résolutions afin d’améliorer l’efficacité du Conseil et de le «retard de mise en œuvre». Le Brésil a noté que, compte tenu de la charge de travail croissante de nombreux États, il est essentiel de veiller à ce que les consultations se déroulent de manière transparente et ouverte et à ce que les projets de résolution soient diffusés le plus tôt possible avec l’engagement de tenir au moins deux réunions informelles ouvertes à tous. La nécessité d’un plus grand dialogue interétatique a été reprise par de nombreuses délégations au cours du débat.

Le Luxembourg, s’exprimant au nom des pays du Benelux, a appelé le Président à prendre des mesures plus fermes concernant les allégations de représailles et d’intimidation à l’encontre des acteurs de la société civile engagés dans le Conseil des droits de l’homme. Ils ont appelé le président à s’assurer que les représailles et les actes d’intimidation reçoivent l’attention du public par la dénonciation publique, et ont suggéré que le Bureau maintienne un registre public d’un tel acte sur l’extranet. Ils ont également appelé le Président à fournir de brèves mises à jour orales sur les cas, y compris sur les mesures prises, au début du point 5 de l’ordre du jour et à collaborer avec le Sous-Secrétaire général Andrew Gilmour sur des cas spécifiques.

Dans sa déclaration, le Maroc, au nom d’un groupe de pays, a réitéré l’importante contribution que les parlements nationaux et les parlementaires peuvent et doivent apporter à la promotion et à la protection des droits de l’homme au niveau national. Il a particulièrement souligné la position unique des parlements nationaux «pour contribuer à combler le déficit de mise en œuvre, prévenir les violations des droits de l’homme et assurer une meilleure protection pour leurs citoyens».

La Bulgarie, s’exprimant au nom de l’UE, a exprimé son soutien sans réserve au travail du Haut-Commissaire et de son bureau et espère que le nouveau plan de gestion organisationnelle du HCDH pour la période 2018-2021 permettra au Bureau de s’adapter au nombre croissant de demandes, les attentes et les responsabilités, démontrant ainsi la pertinence continue des mécanismes des droits de l’homme et l’engagement au niveau des pays.

Dans sa déclaration, l’Uruguay, au nom d’un groupe de pays, a réaffirmé qu’il importait de renforcer la coopération entre les États et les procédures spéciales et d’améliorer le suivi et la mise en œuvre des recommandations à cet égard. L’Uruguay a souligné que tandis que le Conseil cherchait des moyens plus efficaces d’améliorer ses méthodes de travail; il devra également préserver la qualité du débat dans les plages horaires déjà limitées réservées aux dialogues interactifs avec les procédures spéciales.

Table ronde et débat général sous le point 10

La discussion thématique annuelle sur la coopération techniquepour la promotion et la protection des droits de l’homme, tenue le 4 juillet 2018 et mandatée par la résolution 36/28 du Conseil des droits de l’homme, portait sur le renforcement de la coopération technique et du renforcement des capacités pour contribuer à une mise en œuvre efficace et inclusive du Programme de développement durable à l’horizon 2030. Dans son allocution d’ouverture, Georgette Gagnon, chef du FOTCD, HCDH, a souligné l’importance de la coopération technique en matière de droits de la personne pour la réalisation du Programme 2030. Elle a noté qu’une coopération technique ciblée peut aider à atteindre les personnes les plus en retard en abordant la discrimination en droit et en pratique, et en encourageant la participation à la prise de décision. En outre, le renforcement des capacités des États membres et des parties prenantes est également prévu pour identifier et opérationnaliser les liens entre les obligations en matière de droits de l’homme et les ODD.

Le Portugal, s’exprimant au nom du Groupe d’amis sur la mise en œuvre nationale, les rapports et le suivi, a rappelé la déclaration du Secrétaire général des Nations Unies à l’ouverture du CDH37, au cours de laquelle il a souligné le besoin urgent de «renverser la tendance actuelle» contre les droits de l’homme, en mettant l’accent sur la mise en œuvre au niveau national du riche production des recommandations formulées chaque année par les mécanismes internationaux des droits de l’homme. Le Secrétaire général a reconnu qu’un élément clé d’un tel programme devait être d’intégrer les recommandations relatives aux droits humains dans la planification et l’action globales des Nations Unies, en particulier au niveau national par le biais des coordonnateurs résidents, des équipes pays et des cadres d’aide au développement. Il a également attiré l’attention sur l’importance de l’amélioration de la mise en œuvre des droits de l’homme tant pour son programme de prévention que pour la réalisation du « ne laisser personne de côté » des ODD. Le Portugal, s’exprimant au nom du Groupe des Amis, a salué ces points, en particulier l’accent mis sur les mécanismes nationaux de mise en œuvre, de notification et de suivi (NMIRF). Le Portugal a également souligné le rôle important des parlements, des NMIRF et de la société civile dans le soutien, la supervision et la communication indépendante de la mise en œuvre et de l’impact.

Le Danemark, s’exprimant au nom du Groupe restreint sur les droits de l’homme et les ODD, a souligné que les ODD reflétaient le cadre international des droits de l’homme. Le Danemark a également souligné la nécessité d’opérationnaliser le lien étroit entre les droits de l’homme et le développement durable dans la pratique. À cet égard, ils ont suggéré que les recommandations et les informations émanant des mécanismes des droits de l’homme soient facilement accessibles au système des Nations Unies dans son ensemble, aux États et à la société civile.

Dans sa déclaration, le Botswana a noté que les États devaient s’acquitter de lourdes obligations en matière de présentation de rapports à l’égard de mécanismes multiples et a souligné la nécessité de renforcer les synergies entre les différents mécanismes de notification qui répondent au même objectif. Il a souligné que l’Examen périodique universel constituait la meilleure plate-forme à cet égard et a demandé que soit élaborée une procédure simplifiée de présentation des rapports nationaux des organes conventionnels pour aider les États à s’acquitter de leurs obligations en matière de présentation de rapports.

Au cours du débat général sur le point 10 sur l’assistance technique et le renforcement des capacités, l’Italie a réaffirmé l’importance de la participation universelle aux travaux du Conseil des droits de l’homme et a salué les réalisations du Fonds de contributions volontaires pour les PEID et les PMA, dont le mandat contribue de manière significative à la promesse du Programme 2030 de ne laisser personne de côté.

Les Îles Marshall ont exprimé leur gratitude en tant que bénéficiaire du Fonds d’affectation spéciale pour les PEID / PMA. Il a noté qu’en tant que petit État insulaire, il ne dispose ni des ressources ni des capacités nécessaires pour améliorer les droits de l’homme sans l’assistance technique d’experts et de donateurs extérieurs et a exhorté la communauté internationale à poursuivre ses efforts de collaboration, de partage de l’information et de financement du développement pour assurer la poursuite de la participation universelle de tous les États aux travaux du Conseil des droits de l’homme et de ses mécanismes.

Le Pakistan, s’exprimant au nom de l’Organisation des pays islamiques, a souligné les différents degrés de développement entre les États et souligné qu’une attitude de confrontation est souvent contre-productive pour obtenir des résultats. La coopération technique doit plutôt se concentrer sur des positions non politiques et doit soutenir et compléter les mécanismes et institutions nationaux pour défendre les droits de l’homme par un engagement significatif et constructif.

Résolutions

La 38ème session du Conseil s’est terminée par l’adoption de 20 textes (tous des résolutions). C’est quinze de moins que le nombre de textes (35) adoptés à la 35e session en juin 2017. Cela représente le plus petit nombre de textes adoptés par le Conseil lors d’une session de juin depuis 2009.

Six textes (30%) ont été adoptés par vote enregistré.

16 (80%) des textes adoptés par le Conseil étaient de nature thématique, tandis que quatre (20%) relevaient de situations propres à un pays. Trois de ces derniers traitaient des violations des droits de l’homme au titre du point 4 de l’ordre du jour, deux au titre du point 5, un au titre du point 9 et un visant à protéger les droits de l’homme par l’assistance technique et le renforcement des capacités (sous le point 10).

12 des textes adoptés par le Conseil (60%) avaient des incidences sur le budget-programme (PBI), nécessitant des crédits de 2 787 900 dollars qui n’étaient pas auparavant couverts par le budget ordinaire de l’ONU.

Item de l’agenda Résolutions Core Group PBIs Ressources extrabudgétaires Adoption
3 Élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et des filles Colombie, Mexique Adopté par consensus
5 Le Forum social Cuba Adopté par consensus
3 Droits de l’homme et solidarité internationale Cuba Adopté par vote
(31 – 14 – 1)
3 Renforcement de la coopération internationale dans le domaine des droits de l’homme Venezuela (République bolivarienne du) (nom du Mouvement des pays non alignés) $29,100 Adopté par vote (28 – 14 – 3)
3 Droits de l’homme et changements climatiques Bangladesh, Philippines, Vietnam $181,200 Adopté par consensus
3 Intensification de l’action menée pour éliminer la violence à l’égard des femmes et des filles : prévenir et combattre la violence à l’égard des femmes et des filles dans les environnements numériques Canada Adopté par consensus
4 Situation des droits de l’homme au Bélarus Bulgarie (au nom de l’Union Européenne) $0 Adopté par vote (19 – 6 – 21)
10 Assistance technique à la République démocratique du Congo et établissement des responsabilités concernant les évènements dans la région du Kasaï Togo (au nom du Groupe africain) En attente Adopté par consensus
3 Élimination des mutilations génitales féminines Togo (au nom du Groupe africain) $244,800 Adopté par consensus
3 La promotion, la protection et l’exercice des droits de l’homme sur Internet Brésil, Nigeria, Suède, Tunisie Adopté par consensus
9 L’incompatibilité entre démocratie et racisme Argentine, Brésil, Paraguay, Uruguay $82,400 Adopté par consensus
3 Les droits de l’homme dans le contexte du VIH et du sida Brésil, Colombie, Mozambique, Portugal, Thailand $215,400 Adopté par consensus
3 Le droit à l’éducation : suivi de la résolution 8/4 du Conseil des droits de l’homme Portugal Adopté par consensus
3 Les droits de l’homme et la réglementation de l’acquisition, de la possession et de l’utilisation d’armes à feu par les civils Equateur, Pérou $89,200 Adopté par consensus
4 Situation des droits de l’homme en Érythrée Djibouti, Somalie $22,800 Adopté par consensus
3 Promotion et protection de tous les droits de l’homme dans le contexte des manifestations pacifiques Costa Rica, Suisse $78,700 Adopté par consensus
3 Champ d’action de la société civile : coopération avec les organisations internationales et régionales Chili, Ireland, Japon, Sierra Leone, Tunisie $66,300 Adopté par vote (35 – 0 – 11)
3 Les entreprises et les droits de l’homme : améliorer la responsabilisation des entreprises et l’accès à des voies de recours Argentine, Ghana, Norvège, Fédération de Russie $478,500 Adopté par consensus
5 La contribution du Conseil des droits de l’homme à la prévention des violations des droits de l’homme Colombie, Norvège, Sierra Leone, Suisse $419,100 Adopté par vote (28 – 9 – 8)
4 La situation des droits de l’homme en République arabe syrienne France, Allemagne, Italie, Jordanie, Kuwait, Maroc, Qatar, Arabie saoudite, Turquie, Grande-Bretagne

 

Adopté par vote (26 – 5 – 15)
10 Assistance technique et renforcement des capacités dans le domaine des droits de l’homme en Haïti Haiti $519,000 Retiré par le coregroup
2 Assistance technique à la République démocratique du Congo et suite donnée au rapport de l’équipe d’experts internationaux sur la situation au Kasaï Bulgarie (au nom de l’Union européenne)

 

$4,684,800 Retiré par le coregroup

Analyse et conclusion

On se souviendra principalement de la 38ème session du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies comme le moment où l’administration du président Donald Trump a retiré les États-Unis du Conseil. Alors que certains pensent que cela était inévitable compte tenu de l’antipathie du Parti républicain envers le corps, d’autres soutiennent que c’est la conséquence de l’échec, au cours des douze mois qui se sont écoulés depuis la visite de l’Ambassadeur Nikki Haley au Conseil en juin 2017, pour assurer la réforme de l’ordre du jour / programme de travail du Conseil et de ses élections / membres. Le «désengagement» renouvelé des États-Unis par le Conseil (les États-Unis se sont également désengagés entre 2006 et 2009, sous la présidence de George W. Bush) comporte un certain nombre de risques, mais aussi certaines opportunités.

D’une part, il existe un risque évident que la décision des États-Unis compromet la crédibilité et l’efficacité de l’organisme. Par exemple, depuis 2009, les États-Unis ont été l’acteur clé du Conseil en cherchant à faire face aux situations de violations des droits de l’homme dans le monde (en particulier au point 4). Avec son retrait, il y a un risque clair que cet aspect important du mandat et du but du Conseil soit encore plus négligé (à ce jour, seulement 8% des résolutions du Conseil ont traité des situations de violations au titre du point 4). Les États-Unis ont également été, au cours de leur adhésion, un champion de «l’espace de la société civile» et de la participation des ONG au Conseil – des domaines qui pourraient subir des pressions accrues après son départ. Cependant, le plus grand risque réside peut-être dans la crédibilité et l’influence des États-Unis, à la fois en termes absolus et par rapport à leurs principaux rivaux géopolitiques. L’exemple historique de 2006-2009 (la période précédente du désengagement américain) est à cet égard instructif. Durant cette période, les États-Unis ont tenté – et largement échoué – d’influencer les principales décisions du Conseil (y compris la décision d’inclure les violations israéliennes dans les territoires palestiniens occupés en tant que point distinct du Conseil et la décision de tenir des «sessions extraordinaires» sur Israël).

Néanmoins, le retrait des États-Unis présente également un certain nombre d’opportunités importantes pour les États et pour le Conseil dans son ensemble.

En ce qui concerne les opportunités, les États-Unis sont susceptibles de faire pression sur d’autres États occidentaux, en particulier l’UE et ses membres, mais aussi l’Australie, le Canada et d’autres, pour porter à l’attention du Conseil des situations de violations (sous le point 4). On s’attend également à ce que les démocraties latino-américaines assument la responsabilité de traiter les situations de violations dans les Amériques. Sur ce dernier point, il convient de noter que la CDH38 a fait l’objet d’une déclaration conjointe interrégionale sur la situation au Venezuela, menée par le groupe Lima plus et avec le soutien de 53 États. Il semble hautement improbable qu’une déclaration soutenue par les États-Unis ait recueilli le même niveau de soutien.

Pour le Conseil dans son ensemble, il est possible que le retrait américain serve à réduire la politisation et la division, ce qui signifie qu’il peut se concentrer sur d’autres parties clés de son mandat telles que le soutien et le suivi de la mise en œuvre des obligations et engagements des États en matière de droits humains, apportant une assistance technique aux droits de l’homme et un soutien au renforcement des capacités des États, servant de forum pour le dialogue international et la coopération sur les questions de droits de l’homme et prévenant les violations et l’escalade des crises. Certains «observateurs du Conseil» affirment avoir vu des signes naissants d’une telle «dépolitisation» au CDH38 (par exemple, l’adoption par consensus de la résolution Équateur-Pérou sur l’utilisation des armes à feu).

Un important test pour savoir si le désengagement américain aura un impact net positif ou négatif sur le Conseil et ses travaux est la nouvelle initiative visant à renforcer la contribution de l’organisme à la prévention des violations des droits de l’homme et à l’escalade des crises. Suite à deux déclarations communes sur la question à CDH36 et CDH37, la CDH38 a vu la Colombie, la Norvège, la Sierra Leone et la Suisse déposer une résolution sur “la contribution du Conseil des droits de l’homme à la prévention des violations des droits de l’homme”. L’objectif simple, mais important, de cette résolution était d’engager une discussion inclusive à l’ONU sur la manière dont le Conseil pourrait mieux remplir son mandat de prévention, en particulier au paragraphe 5f de la résolution 60/251 de l’Assemblée générale, à la fois deux piliers de l’ONU.

La clé du succès de cette initiative sera de changer les mentalités au Conseil (qui, à ce jour, a eu tendance à négliger les situations nationales des droits de l’homme jusqu’à ce qu’elles soient jugées suffisamment graves pour justifier une action au titre du point 4): i.e. de passer de la réaction à la prévention. Cela impliquera à son tour la construction de la confiance entre les États (ainsi qu’avec les ONG). La prémisse de base de la nouvelle initiative du Conseil est que l’organe collabore désormais avec tous les États, sur une base volontaire, pour aider à renforcer la «résilience» nationale des droits de l’homme – empêchant ainsi les violations des droits de l’homme (prévention primaire). La prévention primaire devrait inclure une augmentation significative de «l’investissement» de l’ONU dans le renforcement de la résilience dans le monde. Là où des schémas de violations apparaissent néanmoins dans un pays donné, le Conseil devrait avoir un accès urgent à des informations d ‘«alerte précoce» et devrait disposer des outils et des procédures nécessaires pour établir rapidement un dialogue et assurer la coopération du l’État concerné et les acteurs régionaux concernés, y compris en mettant à profit la «diplomatie préventive», réduisant ainsi le risque d’élargissement ou d’aggravation de la crise (i.e. la prévention secondaire).

Sur la question clé de savoir si l’initiative officiellement lancée au CDH38 a réussi à changer les mentalités ou à renforcer la confiance, le tableau est mitigé. D’une part, l’importance du mandat du Conseil au titre du paragraphe 5f a été largement reconnue, de même que la nécessité de «faire les choses différemment». D’autre part, des désaccords persistants sur la manière d’opérationnaliser ce mandat, tant sur le fond (certains comprennent le mandat uniquement en termes de renforcement des capacités de renforcement des capacités pour les pays en développement, d’autres le voient comme un moyen alternatif de l’attention du Conseil sur le point 4, alors que d’autres le comprennent à travers le prisme de la prévention des conflits ou la «responsabilité de protéger» (R2P) et, sur le plan de la procédure, signifient que le projet de texte fait l’objet d’un «amendement hostile», et a finalement été adopté par un vote (i.e. pas par consensus).

À l’avenir, il sera important que le processus de consultations lancé par la résolution, sous la direction d’un président-rapporteur et de deux rapporteurs, soit inclusif et reflète efficacement les vues et préoccupations de tous les États, ONG et défenseurs des droits de l’homme, les institutions nationales concernant les droits de l’homme (NHRIs), et les mécanismes et représentants pertinents des Nations Unies, dans un ensemble cohérent de propositions qui seront présentées au Conseil en mars 2020.

Un dernier développement important (entre autres) au CDH38 a été la baisse significative du nombre de textes adoptés par rapport à la session de juin dernier (37 à 20). À première vue (bien qu’il soit impossible de dire avec certitude sur la base d’une seule session), cela semble être le résultat de trois années d’efficaces campagnes de la part du Conseil, commencées sous la présidence de Monsieur Joachim Rücker, ainsi que l’actuel processus de renforcement du Conseil (qui comprend un volet «rationalisation») dirigé par le président actuel, Monsieur Vojislav Šuc et son bureau. En principe, ces gains d’efficacité devraient libérer de l’espace à l’ordre du jour du Conseil, permettant aux États, aux ONG et autres d’améliorer le dialogue et de renforcer l’efficacité et l’impact à long terme de l’organisme.


Crédits photo

Gallerie photoA photographer taking a photo of the plate of the United States of America at the 38th Regular Session of the Human Rights Council.20 juin 2018. UN Photo / Jean-Marc Ferré, sous la licence CC BY-NC-ND 2.0.

Standing ovation all Delegates for Zeid Ra’ad Al Hussein, High Commissioner for Human Rights at the 38th Regular Session of the Human Rights Council. 18 juin 2018. UN Photo / Jean-Marc Ferré, sous la licence CC BY-NC-ND 2.0.

Borut Pahor, Président of Républic of Slovénia at the 38th Regular Session of the Human Rights Council.20 juin 2018. UN Photo / Jean-Marc Ferré sous la licence CC BY-NC-ND 2.0.

Ivana Radacic,, Chair of the Working Group on the issue of discrimination against women in law and in practice present his report at the 38th Regular Session of the Human Rights Council.20 juin 2018. UN Photo / Jean-Marc Ferré, sous la licence CC BY-NC-ND 2.0.

Cecilia Jimenez-Damary, Special Rapporteur on the human rights of internally displaced persons, presents her report at the 38th Regular Session of the Human Rights Council.22 juin 2018. UN Photo / Jean-Marc Ferré, sous la licence CC BY-NC-ND 2.0.

Sheila Keetharuth, Special Rapporteur on the situation of human rights in Eritrea present his report at the 38th Regular Session of the Human Rights Council.26 juin 2018. UN Photo / Jean-Marc Ferré, sous la licence CC-BY-NC-ND 2.0.

Philip Alston, Special Rapporteur on extreme poverty and human rights present his report at the 38th Regular Session of the Human Rights Council. 22 juin 2018. UN Photo / Jean-Marc Ferré, sous la licence CC-BY-NC-ND 2.0.

 

 

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